Interview exclusive: Charley Fomen se lâche et fait des révélations fracassantes

Ancien joueur de la Panthère Sportive du Ndé, il a marqué l’histoire du football camerounais en quittant le championnat camerounais directement pour un grand club européen en l’occurrence l’Olympique de Marseille. En vacances au Cameroun, il a accepté d’ouvrir son cœur à www.giga-foot.com et parle de sa carrière qui a connu des moments de gloire, mais aussi une chute qui était jusque-là inexpliquée.

Que devient Charley Fomen ?

Je reste le footballeur que j’ai toujours été et que tout le monde a connu. C’est vrai que je suis en ce moment en vacances au Cameroun et je continue de travailler pour donner une nouvelle orientation à ma carrière.

Avec du recul aujourd’hui, avez-vous le sentiment d’avoir mal géré votre carrière ou bien que votre carrière a été mal gérée par votre entourage ?

Je ne saurai directement pointer le doigt accusateur sur qui que ce soit, encore moins sur moi. Mais je pense qu’à un certain moment, je n’ai pas su prendre les bonnes décisions. J’ai été encouragé en cela par quelques connaissances autour de moi qui ne m’ont pas toujours bien aidé. Il y a des choses que je m’abstiens de dire en ce moment, mais il faudra qu’un jour ce soit mis sur la place publique.

Après votre signature à l’Olympique de Marseille, l’on vous prédisait une carrière radieuse. Surtout que vous faites bonne impression pendant vos premières apparitions sous les couleurs phocéennes.  Mais contre toute attente, la suite a été un fiasco. Pouvez-vous nous raconter ce qui s’est réellement passé ?

Le football est un cercle vicieux. Ceux qui sont autour du football le savent mieux que moi. Tout s’est très bien passé de mon côté. Je suis arrivé à Marseille tout jeune, plein d’enthousiasme. Malgré le fait que j’avais des concurrents de poids à mon poste à l’instar de Taiwo Tayé, Heinze, j’ai pu me faire une place. Même si le temps de jeu n’était pas très important, j’ai au moins appris aux côtés de ces ainés de talent. Il faut aussi dire que je suis arrivé à Marseille sous ordre de Gerets. C’est lui qui m’a recruté, mais au moment de faire ma visite médicale, le staff avait changé. Il n’y avait plus Pape Diouf et Gerets. Après ce changement de staff, il fallait que je me surpasse pour avoir du temps de jeu ; ce qui a été fait. Il ne faut toutefois pas oublier qu’André Ayew et moi avons eu des moments de galère quand Deschamps est arrivé. Contrairement à moi, André Ayew avait des bons conseillers. Alors que mon manager me disait qu’il faut que je me considère encore en formation, je lui ai répondu par la négative. Je lui ai rappelé que j’étais international camerounais et qu’il y avait la Coupe d’Afrique des nations et la Coupe du Monde ; des compétitions auxquelles je souhaitais prendre part. Je visais loin. Dieu merci, je suis resté et j’ai remporté le championnat de France et la Coupe de la Ligue avec Stéphane Mbia et Nicolas Nkoulou. La saison d’après, j’ai été prêté à Dijon en Ligue 2 et j’ai fait une très bonne saison. Puisqu’à l’issue de la saison, nous sommes montés en Ligue 1. Après cette saison, je suis rentré à Marseille parce que Didier Deschamps a refusé que je reste à Dijon. J’ai mentalement été affecté parce que je souhaitais avoir plus de temps de jeu en Ligue 1. Et Dijon me procurait les meilleures garanties. Mais hélas, on m’a obligé de retourner à Marseille. Sauf qu’à la dernière minute de la clôture du Mercato, on m’a fait savoir que j’allais être prêté à Clermont alors que j’avais un contrat mirobolant qu’on me proposait en Turquie. Je suis exclamé et demandé que si le prêt était envisagé, pourquoi ne m’avoir pas laissé à Dijon ? Il y a des trucs louches qui ont créé des brouilles entre mon conseiller Maxime Nana et moi. Je suis senti abandonné en ce moment-là. Heureusement à Clermont, je me suis battu à fond ; ce qui m’a permis de terminer deux fois de suite meilleur arrière gauche de Ligue 2 en 2011 et 2012. Je me suis retrouvé définitivement joueur de Clermont après deux prêts successifs.

Ce que qu’on qualifierait de votre ‘’déclin’’ vous a conduit jusque-là où vous aviez commencé c’est-à-dire au Cameroun. Vous signez à Feutcheu FC et sans achever la saison, vous retournez en Europe. Parlez-nous de cette autre étape de votre carrière !

Je n’oublie jamais là où  j’ai commencé. En plus, il faut aussi savoir bien reculer pour mieux sauter. Quand j’ai fini ma saison avec Clermont, je me suis retrouvé en Islande. J’ai fait une saison là-bas et je suis rentré en France parce que j’étais l’un des joueurs les mieux payés et le club ne pouvait plus supporter. A mon retour, après une pause de trois mois, je me suis ressaisi et je suis rentré au Cameroun pour essayer de me relancer. Il était plus question de travailler davantage ma condition physique. Ce n’était pas trop parce que je voulais jouer au Cameroun parce que j’avais plusieurs autres offres en France. Sans vouloir le dénigrer, je peux dire que le niveau du championnat au Cameroun est très faible. C’est vrai que c’est ce championnat qui a fait de moi ce que je suis, mais au fil des années, il perd en qualité. Quand je viens jouer dans ce championnat, c’est pour aider les jeunes et viser une place en équipe nationale pour le Championnat d’Afrique des nations (Chan) ou une place en équipe nationale fanion. J’avais un défi personnel à relever. Il y a des joueurs qui sont dans de grands clubs et ne sont même pas titulaires, mais qui sont appelés en équipe nationale. Pour moi je n’ai pas compris pourquoi à Marseille où je faisais quelques matchs ; à Dijon ou à Clermont où j’étais titulaire et meilleur du championnat à mon poste, je n’ai pas été convoqué en équipe nationale. Ma signature à Marseille semble avoir dérangé beaucoup de personnes qui croyaient que c’est là-bas que mon niveau de vie avait changé. C’est vrai que c’était meilleur, mais il faut savoir qu’à Panthère du Ndé, le président Feutcheu qui est un père pour moi et madame Ketcha me mettaient aux petits soins. Déjà au Cameroun, je roulais en Touareg. Il faut dire que le jour où Marseille venait me chercher, il y avait également les dirigeants de Saint Etienne qui m’attendaient. Ils sont venus un peu tard. J’étais obligé d’éteindre mon téléphone quand j’étais avec la délégation de Marseille constituée entre autre de Pape Diouf. Après Feutcheu où j’ai fait trois ou quatre mois, je suis rentré en France à Red Star que j’ai failli contribuer à faire monter en Ligue 2. Malheureusement, nous avons perdu un litige qui nous a privés de cette montée.

Aujourd’hui qu’est-ce que vous vous dites ? Qu’il  faut travailler pour véritablement rebondir ou qu’il faut se dire qu’on n’a pas su saisir sa chance et passer à autre chose ?

Je pense que c’est maintenant que je comprends mieux le football. Je suis plus mature et je joue un football plus efficace, pas un football scolaire comme c’était le cas hier. J’ai toujours ma place dans un grand championnat. Il y a des dirigeants qui diront que je suis déjà vieux alors qu’ils n’ont pas de joueurs capables de fournir meilleur rendement que moi. D’ailleurs depuis que je suis au Cameroun, quand je m’entraine avec les meilleurs joueurs des championnats professionnels du Cameroun, ils ont tous de la peine face à moi. Tous veulent me traverser, mais ce n’est jamais facile.

Etes-vous prêt pour un autre challenge au Cameroun ? Si oui, quel est le club pour lequel vous souhaitez jouer ?

Je reste opérationnel à 30 ans. Avant que le Covid-19 ne me bloque, j’étais sur le point de m’engager en Thaïlande. J’avais déjà mon précontrat entre les mains. Mais rien n’est encore calé. Donc je peux toujours m’engager avec un club au Cameroun, à condition que cette équipe ne se dise pas que c’est Charly Fomen qui avait signé un gros contrat à Marseille, mais que c’est un joueur comme les autres. C’est vrai que je n’ai pas faim, mais il faut que les présidents de club au Cameroun puissent apprendre à respecter les joueurs qui ont un vécu. Mon problème souvent à Feutcheu est que je n’étais pas très concentré parce que c’est tous les joueurs qui venaient me poser leurs problèmes. Las d’y apporter des solutions, j’étais obligé de dire à l’entraineur de dire aux autres joueurs de me laisser me concentrer. Quand cela a été fait, mon rendement était meilleur. Mais si je dois encore jouer au Cameroun, il faut que ce soit pour des clubs de Douala, Yaoundé et Limbé. Mais Bafoussam n’est pas exclue. La seule condition est que les président ne soient plus complexés et voient ce que j’ai gagné auparavant. Ils doivent avoir beaucoup de considération pour ces joueurs qui ont un vécu et qui veulent retourner au pays parce que cela permettra de relever le niveau du championnat local. Pour le moment les clubs peuvent directement me contacter ou le faire par le biais de Giga-foot.

Comment envisagez-vous votre retraite ?

Je voudrai rester dans l’environnement du football. Je voudrai faire les affaires, mais dans le management sportif. Aussi je souhaiterais travailler comme directeur sportif d’une équipe. Je vais bientôt commencer les formations nécessaires pour y parvenir. Je ne souhaite pas être entraineur, car je ne veux pas mourir avant le temps.

A partir de votre expérience personnelle, quels conseils pouvez-vous donner aux jeunes footballeurs camerounais ? Grosso modo, quels sont les astuces pour réussir une carrière professionnelle ?

Je peux leur dire de croire en soi, d’avoir la confiance en eux. Je pense que c’est ce qui fait ma force. Après, il faut être discipliné. C’est la discipline qui est la base de tout. C’est vrai que j’ai souvent eu des écarts de conduite, mais c’était de la naïveté, des erreurs de jeunesse. Il faut qu’ils aient une seule voie : celle de Dieu. Et de se dire que dans la vie, il y a des hauts et bas. Il faut se fixer comme objectif de jouer à l’équipe de nationale quelle que soit la catégorie et travailler dur pour y parvenir. Pour moi, tout footballeur doit avoir un statut d’international avant de quitter son pays. Je ne saurai terminer sans saisir cette opportunité pour adresser ma profonde gratitude à ma famille pour son soutien; notamment ma mère qui, malgré sa santé fragile m'accorde tout le réconfort dont j'ai besoin. Je pense également à  Cédric Ketchanga pour le rôle important qu'il joue autour de moi. Je n'oublierai jamais ses précieux conseils.

Interview réalisée par Gaël Tadj


Imprimer